

À l’occasion du bicentenaire de la mort de Napoléon Bonaparte, ce petit volume met à disposition des lecteurs une sélection de ses lettres et discours écrits tout au long de sa vie. Dans cet éventail hétérogène, l’ambition du jeune élève de l’école militaire, l’enthousiasme citoyen du général de la Révolution et la rhétorique, contagieuse, du premier empereur des Français nous font découvrir la gloire de l’homme qui bouleversa le Vieux Continent et le monde entier.
De tous temps adulé et haï, Napoléon Bonaparte (1769-1821) a marqué l’Histoire de l’Europe. Sa correspondance, étonnamment méconnue, révèle toutes les facettes de ce caractère extraordinaire.
Ministre des Relations extérieures depuis 1797, Talleyrand fut l’interlocuteur privilégié de Napoléon pendant la campagne d’Italie. Bien que le rapport entre les deux protagonistes fût chaque jour plus tendu (l’incident diplomatique de 1804 relatif à l’enlèvement du duc d’Enghien en offre un fameux exemple), il demeura le conseiller de l’empereur jusqu’à sa chute. Conscient des projets démesurés de ce dernier, à partir de 1806, Talleyrand commença secrètement à appuyer les gouvernements de Russie et d’Autriche pour se ménager une porte de sortie après l’effondrement – qu’il entrevoyait déjà – d’un régime aux ambitions effrénées. En 1809, tandis que Napoléon était affairé en Espagne, Talleyrand poussa l’Autriche à attaquer la France. L’empereur découvrit sa trahison ; elle ne l’empêcha cependant pas de battre une dernière fois les Autrichiens lors de la bataille de Wagram. À ses mots pleins de rage, Talleyrand répondit : « Quel dommage, Messieurs, qu’un si grand homme ait été si mal élevé. »
8 thermidor an V [26 juillet 1797]
Citoyen, c’est pour des hommes tels que vous, c’est pour mériter leur suffrage que le conquérant tente de beaux faits d’armes. Alexandre ne triomphait peut-être que pour enthousiasmer les Athéniens, et les Athéniennes, pour les autres capitaines, sont les gens d’élite de la société ; vous par exemple.
J’ai trop étudié l’histoire de la Révolution pour ignorer ce qu’elle vous doit ; les sacrifices que vous lui avez faits méritent une récompense ; vous ne l’attendriez pas si j’étais au pouvoir. Vous me demandez mon amitié, elle vous est acquise avec mon estime ; en retour, je sollicite vos conseils, j’en ferai cas, je vous l’assure.
Le tort de la Révolution est d’avoir beaucoup démoli et rien construit, tout est encore à faire. Vous avez raison, mieux vaut la liberté assise sur le faisceau lié que des baguettes détachées.
Qui fermera la Révolution, c’est un problème dont le temps garde le secret, et que résoudront la raison et la nécessité : cela se ferait bientôt si le Dragon à plusieurs têtes n’avait pas intérêt à repousser celui à plusieurs queues.
J’aurai toujours le loisir de lire vos lettres et surtout celui d’en profiter.